Le parti du président Robert Mugabe, qui a stupéfié le Zimbabwe en ignorant d’innombrables appels à sa démission, le somme de quitter le pouvoir lundi faute de quoi il déclenchera contre lui une procédure de destitution. M. Mugabe, au pouvoir depuis 1980, a créé dimanche soir une énorme surprise et la confusion en ne tenant aucun compte des appels à sa démission ni de sa spectaculaire éviction quelques heures plus tôt de la direction de son parti, la Zanu-PF.
Stupéfaction
Lors d’une déclaration péniblement prononcée en direct à la télévision nationale, le plus vieux dirigeant en exercice de la planète, 93 ans, a même déclaré qu’il présiderait le mois prochain le congrès de la Zanu-PF. Le Zimbabwe tout entier s’attendait dimanche soir à ce que Robert Mugabe remette sa démission, quelques jours après le coup de force de l’armée. A l’issue d’une nouvelle réunion avec les militaires dimanche soir, une source de son entourage avait même rapporté sous couvert de l’anonymat qu’il avait accepté de quitter ses fonctions.
Sous le choc de l’allocution du président, le chef des anciens combattants de la guerre d’indépendance Chris Mutsvangwa a immédiatement riposté en appelant la population à descendre une nouvelle fois dans la rue mercredi pour exiger le départ de Robert Mugabe. « Ce discours était totalement déconnecté de la réalité. Nous soutiendrons toute procédure de destitution et appelons à manifester mercredi », a déclaré M. Mutsvangwa.
Grace Mugabe au centre des débats Les militaires ont pris le contrôle du pays dans la nuit de mardi à mercredi pour protester contre la décision du président de limoger le vice-président Emmerson Mnangagwa. Son éviction faisait de la Première dame Grace Mugabe la favorite de la course à la succession de son mari, à la santé déclinante. Dimanche, la direction de la Zanu-PF a démis Robert Mugabe de son poste de président du parti. Et elle lui a lancé un ultimatum en lui enjoignant de quitter le pouvoir « d’ici lundi » 10h00 GMT (11h00 HB), faute de quoi elle engagera une procédure de destitution.
Lors de sa réunion d’urgence, le parti a remplacé son chef par l’ancien vice-président Emmerson Mnangagwa. Ce dernier, un dur surnommé « le crocodile », a dans la foulée été nommé candidat officiel de la Zanu-PF à l’élection présidentielle de 2018 à la place de Robert Mugabe. L’ambitieuse et impopulaire Première dame Grace Mugabe, 52 ans, qui brigue ouvertement depuis des mois la succession de son époux, a elle été purement et simplement exclue du parti.
Les décisions de la Zanu-PF ont été saluées par une population avide de changements, dans un pays ruiné où le taux de chômage avoisine les 90%. Depuis son coup de force, l’armée tente de négocier à l’amiable le départ du président Mugabe, afin de préserver son statut de héros de la guerre d’indépendance. Elle l’a même laissé se rendre vendredi à une cérémonie de remise de diplômes universitaires à Harare, alors qu’il est officiellement assigné à résidence.